Récit de voyage
Baptême à l’eau salée pour une immersion dans le grand bain, nous partons pour un périple loin des côtes qui doit nous conduire d’Edinbourg aux Iles Lofoten. Une petite semaine de traversée entre mer du nord et mer de Norvège avec une immersion dans l’océan glacial Arctique et le passage du mythique Cercle Polaire.
Le soir venu, durant les quarts, les sensations s’amplifient et la perception se modifie. Nous nous retrouvons à deux pour un moment privilégié, partagé. Instants précieux où la contemplation prend le pas sur l’action.
Accompagné par un vent arrière favorable qui nous pousse à vive allure vers notre destination, nous bénéficions de conditions de navigations clémentes. Grâce à la pédagogie et à la patience de nos marins l’apprentissage se fait dans la bienveillance. L’équipage s’amarine en même temps que les grimpeurs commencent à faire des tractions ! « chassez le naturel… » Nous découvrons une autre manière douce d’évoluer sur l’eau et profitons de cette traversée où tout n’est que mouvements et beauté, manœuvres quarts et nouveautés.
Après 7 jours en mer, le bateau devient un vrai Drakkar viking ! Mais cette perte de confort, cette vie en huit clos sans miroir, a paradoxalement quelque chose de confortable. Les codes sociétaux laissent place à plus de sincérité, l’humour se charge du reste.
Les Lofotens
Dés le début du voyage une belle énergie collective, joyeuse, bienveillante et productive est déployée. Elle se renforce au fil des jours et participe à l’émergence de l’identité du groupe. Nos journées, malgré la fatigue, sont rythmées par des chansons, des fous rires, des jeux… Les quarts, espaces de discussions profondes et intimes, mais aussi de contemplation permettent de tisser des liens intenses. Rapidement les barrières tombent pour laisser place à la sincérité et au partage d’opinions, de visions, d’expériences…
Arrivé dans le sud des iles Lofoten, influencé par l’enthousiasme débordant des grimpeurs, c’est tout l’équipage qui débarque à terre, au pied de l’imposante face Ouest de 600m de haut de l’Helvetestinden. Après les temps forts de la vie à bord et du huit clos imposé par le bateau, c’est celui d’un véritable camp de base qui attend la nouvelle cordée.
En plus d’être la plus méridionale de l’archipel des Lofoten, Moskenesoya est sans conteste l’ile la plus attractive pour des alpinistes en quête d’exploration et d’ouvertures de nouveaux itinéraires. Lorsque dans les Alpes, tous les sommets, toutes les arêtes et toutes les faces ont été gravis, il reste, dans quelques rares coins isolés de la planète, souvent accessibles uniquement en bateau, des pans entiers de montagnes à explorer. La plage de Bunes et les satellites rocheux, souvent de plus de 500m de haut qui l’entourent, en font partie.
Un de ces lieux où chaque sommet est un rêve de grimpeur. Inspirée, c’est ici, dans ce paradis vertical mis en relief par la ligne horizontale de la mer du nord que l’équipe d’Ocean Peak a choisi d’élire domicile.
Notre accès grâce à Trifon, est largement facilité. L’approche en bateau prend ici tout son sens.
Nous remplaçons le soleil trop souvent absent par une grande tente« messe » orange dans laquelle toute l’équipe peut se retrouver pour les repas et les temps en commun. Elle sera notre abri incontournable pour nous protéger des grains et des caprices parfois violents de la météo arctique. Autour de l’astre salvateur, une petite constellation de trois tentes deux places, orange elles aussi, nous servent de dortoir. Aucun des palaces de la planète, ni aucune suite royale ne pourraient rivaliser contre notre camp de fortune, nos chambres avec vue. Et si de vagabonds il est question, ils sont célestes, sans conteste.
De l’autre côté du fjord, une éclaircie sans vent permet à une partie de l’équipe de s’envoler en parapente du sommet qui surplombe la plage et concentre l’objet de nos convoitises. Instants magiques, le parapente se révèle être aussi un magnifique moyen d’observation pour scruter les futures lignes verticales que nous souhaitons grimper. Suspendus entre deux mondes, en apesanteur, la vue de la mer, de la côte, de notre camp et de la face ouest, forment une unité exceptionnellement belle. Chanceux, nous nous rapprochons de reliefs acérés et de points de vue inédits, d’habitude réservé au domaine des oiseaux. La plage est immense, l’atterrissage à quelques mètres des tentes, sans danger.
Très vite l’attraction du sommet qui nous domine prend le dessus. Nous commençons l’exploration de la face par une première voie esthétique ouverte par Tommy Caldwel et Beth Rodden deux légendes de l’escalade américaine qui ont laissé leur signature sur le pilier droit qui borde la face. Puis c’est avec Antoine, Benoit, Marta et Robin que nous poursuivons la découverte de cette face grandiose. Cette fois-ci, les marins sortent de leur zone de confort et expérimentent de nouvelles techniques, de nouveaux efforts et parfois de nouvelles appréhensions. Ces ascensions nous rappellent qu’un des nombreux enjeux de cette première expédition est aussi d’observer comment, de ces épreuves initiatiques, des enseignements peuvent être tirés et transposés (ou pas) dans la vie de tous les jours. La motivation, l’engagement, la prise de décision, la confiance en soi sont autant de thèmes qui prennent corps lorsque vous êtes suspendus à plus de 400m du sol.
De ces aventures, imposées par le relief et parfois par la météo, se dégagent des contrastes forts. La pratique de la montagne peut permettre de prendre de la hauteur au propre comme au figuré. La privation ou la frugalité, même de courte durée, peuvent redonner une saveur très intense au petit rien du quotidien.
La météo locale ne nous permettra pas d’ouvrir la ligne de nos rêves. Après une période de beau temps historique, la pluie s’installe durablement sur la plus méridionale des iles des Lofoten. Petite partie du monde réputée davantage pour sa météo capricieuse que pour ses anticyclones, cette ile du nord aura su conserver une part de secrets. Un jour nous nous reverrons…
Témoins de l’évolution du groupe et des individualités durant un mois de voyage et d’aventure, chacun, à l’aide de son talent, aura retranscrit ce qu’il a observé, ce qu’il a ressentit et finalement ce qu’il a vécut.
D’une première expédition au delà du cercle polaire nous ramenons plusieurs trésors et tout d’abord une « matière » exceptionnelle : peintures, textes, films et photos que nous souhaitons aujourd’hui partager. Mais également le témoignage et la conviction que les ingrédients utilisés pour ce premier « opus » Oceanpeak sont les bons.
Que de telles expériences sont propices à développer un nouveau regard sur le monde et ceux qui le composent, mais aussi à générer une envie de changement.
Nouvelles expériences, associées à de nouveaux défis… De la même manière que l’on partage le lien de la corde, le sillage de Trifon continuera d’appartenir à tous ceux qui voudront bien nous accompagner.
Initiateurs et porteurs de projet

Benoit Lacroix
30 ans
Marin – Traversée de l’Atlantique en solitaire et sans moyen de communication
Grimpeur – plusieurs participations aux championnats de France d’escalade
Entrepreneur – Président et Fondateur du réseau de salles d’escalade The Roof / Fondateur et organisateur du Vertical Ocean Camp
Educateur – 8 ans d’expérience auprès de jeunes en difficulté / Organisateur du projet Gravir en Confiance

Christophe Dumarest
38 ans
Alpiniste – 20 ans d’expédions aux quatre coins du monde
Conseiller technique auprès de différents fabricants/sponsors de l’industrie « alpine »
Guide de haute montagne – 10 ans d’accompagnement sur les plus beaux sommets des Alpes
Chroniqueur – rédacteur régulier pour le titre Alpes magazine
Co-réalisateur du film «Inside» et protagoniste/auteur de 6 films dont 4 longs métrages

Marta Güemes
32 ans
Navigatrice – Traversée de l’Atlantique en solitaire et sans moyen de communication.
Monitrice de voile – formée en Irlande et dans les mers du nord.
Ingénieur – 8 ans d’expérience dans la gestion de projets d’ingénierie en France et à l’international
Communiquante – maitrise de 5 langues vivantes.
L'Équipe

Robin Montrau
Chef Opérateur chez AHStudio
Il est comme tous, chez AHStudio, spécialisé en prise de vue en condition difficiles avec des camera cinéma. Créatif, professionnel avec un grand sang froid c’est la force tranquille de l’équipe.

Jean Saucet
Le plus humain des marins et préparateur de bateaux pour
les plus grands navigateurs.

Alex Buisse
Photographe

Lucie Legrand
Peintre
https://www.lucielegrand.com

Antoine Rolle
Alpiniste
Alpiniste de haut niveau, aspirant guide, parapentiste, Antoine est là pour « verticaliser » l’aventure.

Trifon
Un Lévrier des mers en aluminium de 16m de long. Un voilier performant et solide capable d’accueillir jusqu’à 10 personnes à bord.